Michel Ocelot anime le Paris d’antan

Michel Ocelot est un nom trop peu connu des amateurs de films pour enfants malgré son expérience et son expertise dans le domaine. Pourtant, quel parent le moindrement curieux n’a pas emmené un enfant voir l’un de ses trois longs métrages mettant en scène le personnage de Kirikou ou encore n’est pas tombé sur la diffusion de ses œuvres à la télé durant la période des Fêtes? Le réalisateur français, aujourd’hui âgé de 75 ans, était de passage au Québec récemment pour faire la promotion de son nouveau long métrage d’animation, Dilili à Paris (en salle dès le 21 décembre). Voici ce qu’il avait à dire sur cette histoire d’une jeune immigrante à Paris au début du XXe siècle qui mènera, aux côtés d’Orel son compagnon se déplaçant en triporteur, une enquête sur des fillettes qui ont disparu mystérieusement.

Q : D’où vient le prénom de votre jeune héroïne, Dilili, aussi singulier et exotique que Kirikou?

Michel Ocelot, réalisateur

R: Je cherchais un prénom avec des syllabes qui auraient une belle consonance. C’est un exercice très difficile d’en trouver un qui n’existe pas encore. Il fallait de plus qu’on puisse l’associer à la culture kanake de la Nouvelle-Calédonie puisque ce sont les origines de Dilili.

Q : Votre film met en scène des personnages animés évoluant dans des décors qui sont en réalité des photos de Paris. Le tout donne un côté réaliste et nostalgique à votre film. Était-ce un défi technique plus grand?

R : On me pose souvent la question et j’étonne tout le monde en disant qu’au contraire, l’intégration des photos que j’ai moi-même prises de Paris a facilité la production. Ça allégeait la confection au final. L’idée derrière tout ça, c’était aussi de bien balancer cet univers sombre d’enlèvements avec un décor plus lumineux, plus inspirant. Je voulais faire un beau film qui parle de choses graves, car je crois toujours en l’humanité.

Q : Vous semblez prendre un malin plaisir à intégrer au récit de nombreuses figures populaires de l’époque (Marie Curie, Colette, Toulouse-Lautrec, Camille Claudel, Erik Satie). Qu’est-ce qui vous charmait dans cette idée?

R : Quand on explore cette période, on se rend compte qu’il y avait des génies à tous les coins de rue. Tout était à inventer, c’était une époque très florissante en arts, en littérature, en peinture, en sciences. Les célébrités qui se retrouvent dans mon film, je les aime. C’était très motivant de faire leurs portraits. Et ce qui est pratique, ils sont tous morts, donc personne n’a refusé d’apparaître dans mon film (rire).

Q : C’est seulement votre cinquième long métrage alors que Claude Chabrol, lui, par exemple, en réalisait cinq par année et…

R : Je vous interromps car là, vous retournez le fer dans la plaie, je vous promets que le prochain, je vais le faire très vite (rire).

Q : Le cinéma d’animation en Europe nous apparaît original, brillant et très vivant avec vos films, mais aussi avec des productions comme La Tortue rouge et Ma vie de Courgette. Est-ce quand même encore difficile de faire aboutir de tels films en 2018?

R : Il ne faut pas trop pavoiser, car le financement est toujours difficile à trouver. Le public est volage et dressé à aller voir les films américains. Mais c’est vrai, il y a de très beaux longs métrages d’animation européens qui ont été réalisés ces dernières années. Mais l’idée, c’est d’en faire le plus possible pour acquérir une expertise et toujours de meilleurs pour gagner le public.