Trio féminin sous le soleil de la Corse

Belle-fille, c’est l’histoire de Louise qui, découvrant que son mari la trompe, décide de penser enfin à elle et de partir à la découverte de la Corse. Mais une aventure d’un soir prendra une tournure funeste. L’amant perd la vie et, rapidement, Louise voit la famille du défunt s’immiscer dans ses vacances, au point de la faire devenir la belle-fille rêvée aux yeux de sa nouvelle belle-mère.

Comédie sans prétention, chauffée par le soleil et les paysages uniques de la Corse, Belle-fille est une réalisation de Méliane Marcaggi qui fournit tout l’espace nécessaire à Alexandra Lamy et Miou-Miou pour se donner la réplique. Brève rencontre avec trois femmes qui ont de la répartie et qui respirent la joie de vivre.

Méliane Marcaggi, réalisatrice.

Le Clap : Méliane, quand on fait une comédie où la Corse, sa culture et ses habitants sont au coeur du récit, on peut facilement tomber dans la caricature. C’était le piège à éviter, selon vous qui êtes de plus Corse d’origine?

Méliane Marcaggi : Oui, j’ai vraiment voulu éviter la caricature tout en exploitant les caractéristiques de mon coin de pays, les paysages, les personnalités fortes. En fait, dans chaque région, on peut trouver des choses très drôles et pittoresques. Mais l’idée première, c’était de situer l’action sur une île, un lieu qui isole. Il faut ensuite trouver le ton juste et réussir à faire rire. Il fallait que la Corse existe en images, qu’on la sente dans l’histoire pour sa dualité mer/montagne et l’âpreté de sa géographie.

Le Clap : Alexandra et Miou-Miou, comment vous êtes-vous retrouvées dans cette aventure?

Miou-Miou : On était en solde, les autres avaient refusé (rire)! Mais c’est  une histoire qui doit faire rire et nous sommes très à l’aise dans la comédie. Méliane a fait de très bons choix pour sa distribution.

Alexandra Lamy : Moi, j’étais très intimidé à l’idée de donner la réplique à Miou-Miou. Ma mère est une de ses grandes fans et, en plus, elle est une Herry alors elle pense être dans la même famille (rire)! (N.D.L.R. Sylvette Herry est le nom de naissance de Miou-Miou).

Le Clap : Le fait de tourner sur une île, ça a sûrement favorisé un lien de camaraderie pour l’équipe entière?

Alexandra Lamy : Absolument! Et en plus, ça nous permettait de rester dans nos personnages. On ne quittait jamais vraiment l’histoire, on en reparlait au repas et ça nous préparait pour le tournage du lendemain. En plus, être en Corse, c’était plus que formidable.

Miou-Miou : Ça me rappelle que l’heure de l’apéro était pour moi le meilleur moment du tournage. On se douche, on redescend voir l’équipe et là, la première question, c’est : « Tu prends quoi ? » (rire).

Le Clap : Tourner en Corse, loin de Paris et des grands centres, côté main-d’Œuvre et facilités pour les lieux de tournage, est-ce une chose facile?

Méliane Marcaggi : Il y avait trois tournages simultanément quand nous y étions, alors tout le monde du milieu travaillait sur l’île. Tous ceux qui avaient de l’expérience sur un plateau étaient au travail. Hormis Belle-fille, deux séries télé se tournaient en même temps, une avec Laetitia Casta et une autre avec Mathilde Seigner. C’était très plaisant de se croiser.

Le Clap : Oui, j’imagine que le soir venu, il y avait de l’achalandage pour l’apéro. Votre film en est un d’engrenages, de scènes malaisantes qui se succèdent. C’est ce qui assure le succès d’une telle comédie, non?

Miou-Miou : Tout à fait, c’est couche sur couche, mensonge sur mensonge, quiproquo sur quiproquo.

Alexandra Lamy : Au scénario, ça fonctionnait très bien, alors ça donnait envie de tourner le tout. Et lors du tournage, la mécanique a suivi.

Le Clap : Patrick Mille, trop peu connu à mon avis, joue votre amoureux Alexandra, un infidèle de première classe. Il a vraiment une bouille qui transpire l’infidélité et le mensonge cet acteur.  Pour une comédie, il a une tête parfaite pour ce rôle ingrat.

Alexandra Lamy : Oh oui, il est formidable. Il joue le fourbe à la perfection. Je suis bien d’accord (rire)!

Le Clap : Thomas Dutronc joue quant à lui votre nouveau prétendant qui, cependant, ne vivra pas très longtemps. Il habite en Corse comme ses parents, Jacques Dutronc et Françoise Hardy. Il devait se sentir chez lui?

Méliane Marcaggi : Oui et en plus il a également composé la musique du film. Il connaît le coin comme le fond de sa poche et, évidemment, le projet lui plaisait encore plus, car il n’avait pas à voyager très loin pour faire son boulot. Même si son rôle n’est pas majeur, son apport, pour la musique, a été essentiel.

Belle-fille prendra l’affiche en salle au Clap dès le 2 octobre. Cette entrevue a été réalisée sur invitation, dans le cadre de la 22e édition des Rendez-vous du cinéma d’UniFrance 2020, à Paris.

L’effet papillon

La sortie de Nadia, Butterfly, en salle dès le vendredi 18 septembre, était fort attendue des cinéphiles. Avec raison car d’une part, le film a été certifié « Festival de Cannes 2020 » même si l’événement public fut annulé. Ensuite, il a eu l’honneur d’ouvrir l’édition 2020 du Festival de cinéma de la Ville de Québec. Finalement, Pascal Plante, depuis la sortie de son premier long métrage, Les Faux Tatouages, est un cinéaste définitivement talentueux dont on a envie de suivre les traces. De passage à Québec pour souligner le lancement de son film, le réalisateur, accompagné de son actrice principale Katerine Savard, a bien voulu nous donner des détails sur le tournage de ce récit où le sport, au final, est surtout le prétexte pour mettre en scène un personnage qui vit un spleen post-compétition.

Nadia, Butterfly relate la toute dernière compétition olympique d’une nageuse canadienne lors des Jeux de Tokyo en 2020 et la soirée festive qui suivra l’obtention d’une médaille pour cette athlète qui sent qu’une nouvelle vie l’attend. Dans le rôle principal, on retrouve Katerine Savard, nageuse olympique canadienne, originaire de Pont-Rouge, qui entend bien retourner, dans la « vraie vie » aux prochains Jeux d’été de Tokyo en 2021, événement qui a été repoussé d’un an à cause de la pandémie. Katerine partage l’écran avec Ariane Mainville, une autre nageuse émérite qui faisait elle aussi ses premiers pas au grand écran.

Le Clap : Pascal, le sujet de votre second long métrage est très éloigné des Faux Tatouages, est-ce que le désir de parler de natation et d’une athlète est relié à votre propre cheminement d’ex-nageur?

Pascal Plante, réalisateur

Pascal Plante : J’ai fait partie du Rouge et Or de l’Université Laval en natation. Donc, effectivement, c’est un milieu que je connais bien. Mais quand j’ai quitté la compétition, ça s’est bien passé au contraire du personnage de Nadia, car je savais déjà que j’allais me diriger vers le milieu des arts. Donc, même si ce n’est pas autobiographique comme histoire, le temps que j’ai passé dans des piscines, j’avais envie de le réinvestir sur grand écran, de le faire ressentir sur les plans sonore et visuel et, au final, je suis fier du résultat même s’il n’est pas parfait, car c’est un film un peu curieux, j’en suis conscient.

Le Clap : Parlant de curiosité, ce serait une erreur de le qualifier de drame sportif alors que l’atmosphère qui porte le film rappelle beaucoup celle de Lost in Translation, notamment pour les scènes d’errance à Tokyo, non?

PP: Oui, l’errance est là longtemps. Les 25 premières minutes relèvent du film sportif, mais ensuite on est ailleurs. D’ailleurs, dans mes films préférés qui parlent de sport, comme Raging Bull, ce n’est pas le sport qui est au cœur du récit. En même temps, je n’ai pas revisité Lost in Translation, mais le spleen est bien présent. Ça, c’est sûr. Et techniquement, on s’est gâté pour utiliser plein de trucs qui allaient donner du style aux images. Quelque chose peut rappeler des univers comme ceux de My Florida Project, des œuvres d’Andrea Arnold ou même de Fellini. Un réalisme qui peut ou tente de toucher au magique. Bref, je suis loin des films des frères Dardenne ou de Kechiche avec Nadia.

Le Clap : Un récit qui se déroule à Tokyo, pour un long métrage québécois, ça vient automatiquement gruger une grosse partie du budget, non?

PP : On a été à Tokyo pour tourner le quart du film, dont les scènes extérieures évidemment. Mais tout le reste, on était à Montréal et il fallait recréer Tokyo pour les scènes intérieures et sérieusement, c’est aussi très complexe à faire. Les logos, les mascottes, les costumes d’Équipe Canada, ça aussi c’était énorme comme boulot afin d’arriver à donner une impression de réalisme. Il y a eu un gros travail de direction artistique. Les médailles ont été créées avec une imprimante 3D, je n’en revenais pas moi-même de cette possibilité, à quel point ça peut nous aider quand notre budget est relativement modeste.

Le Clap : Le film est certifié Cannes 2020, il vient de faire l’ouverture du FCVQ et sort en salle au Québec, quelle est la suite des choses?

PP : Il sortira en France au printemps prochain, mais les distributeurs internationaux sont frileux à cause de la pandémie. Au moins, Nadia fait plein de festivals dont Busan en Corée du Sud. Donc il y a une belle vie qui se dessine pour le film. Mais d’avoir le label cannois, ça vient avec son lot d’attentes. Ça, ça me stresse. Les gens le voient comme le film à voir et je me dis qu’il ne faut pas avoir de trop grandes attentes. Il faut juste se laisser embarquer par Nadia, Butterfly.

Pascal Plante sera au Cinéma Le Clap le dimanche 20 septembre, à 16 h20, pour rencontrer le public qui assistera à la projection de son film.

En terminant, un petit mot de l’actrice principale au sujet de son expérience de tournage.

Katerine Savard, actrice et athlète olympique.

Katerine Savard : Pascal nous a vraiment bien dirigées et encadrées, Ariane et moi. On ne connaissait rien au cinéma. Oui, il fallait, au moins dans mon cas, me rassurer lors des prises. Durant le tournage, je suivais les directives, j’avais un certain stress de ne pas être à la hauteur. Cela dit, mon personnage était loin de moi. Exemple, je n’ai jamais vécu de fête comme on le voit dans le film, rien d’aussi intense, sans nier que ça peut arriver. On le vit aussi selon nos personnalités, on vit des Jeux olympiques de façon très différentes. Ariane et moi, on s’est réellement rapproché lors du tournage et je suis heureuse qu’on dise que ça transparaît à l’écran. Quand j’ai vu le film la première fois, je me demandais si j’allais être naturelle à l’écran. Je passais mon temps à m’analyser. J’ai hâte de le revoir sans avoir cette réaction. Ensuite, j’avoue que j’aimerais répéter l’expérience et éventuellement obtenir un autre rôle au cinéma.