Trumbo, un scénario de peur !

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Bonne nouvelle, le film Trumbo sera à l’affiche vendredi! Durant plusieurs semaines, on s’est pourtant demandé si le long métrage allait être distribué à Québec ou bien ne sortir qu’en version originale anglaise à Montréal. Heureusement, cette biographie romancée se rendra dans nos salles et en plus, elle s’avère une production de fort calibre.

Trumbo relate la vie de Dalton Trumbo, l’un des plus brillants scénaristes d’Hollywood qui, après la Seconde Guerre mondiale, sera mis sur la célèbre liste noire établie par la politique du maccarthysme visant à ostraciser tous les sympathisants communistes sur le territoire américain. Reconnu coupable d’outrage face à la commission d’enquête, TRUMBO-Movie-PosterTrumbo sera incarcéré durant onze mois puis, pour réussir à faire vivre sa famille, il poursuivra une carrière clandestine de scénariste, signant de nombreux films oscarisés sous divers pseudonymes. Son calvaire prendra fin lorsque Kirk Douglas (Spartacus) et Otto Preminger (Exodus) l’inscriront sous son vrai nom aux génériques de leurs films à la fin des années 50.

Bien que conventionnel dans sa structure dramatique et biographique, Trumbo est habilement mis en scène par Jay Roach, un cinéaste associé depuis ses débuts aux séries de comédies loufoques (Austin Powers, Meet the Parents). Le propos du long métrage, quoique déjà abordé dans plusieurs œuvres auparavant (Good Night, and Good Luck, The Front, Guilty by Suspicion), est encore aujourd’hui bouleversant. La mise en place de cette chasse aux sorcières grotesque donne toujours aussi froid dans le dos. Et au-delà de la question politique, le récit explore fort heureusement les zones d’ombre d’un scénariste d’allégeance communiste certes, mais également narcissique et adepte d’un train de vie bourgeois californien.

Trumbo se retrouvera assurément et avec raison aux Oscars. La réalisation est soignée, le scénario des plus efficaces et surtout, Bryan Cranston, mieux connu pour sa performance imagesdans la série télé Breaking Bad, y trouve son plus beau rôle au grand écran. De la première à la dernière scène, Cranston éblouit par sa justesse de ton, alternant entre un humanisme profond et un égocentrisme évident. L’acteur est de plus fort bien entouré par Helen Mirren, Diane Lane, John Goodman, Louis C.K. et autres comédiens incarnant des gloires de l’époque comme John Wayne, Kirk Douglas ou Edward G. Robinson.

L’absence de super-héros dans le film nous incite à prédire que Trumbo ne cartonnera pas au box-office comme il le mériterait. Mais blague à part, il faut souhaiter que cette œuvre trouve son public, car des héros dans Trumbo il y en a. Ce sont des hommes qui ont été pointés du doigt, espionnés, dont la vie privée a été bafouée par les autorités de l’époque. De plus, un régime de peur s’est acharné à salir leur réputation. Des hommes et des femmes qui se sont battus pour la liberté de penser dans un monde pas si lointain du nôtre. Bref, il ne faut pas avoir peur d’aller voir Trumbo!

Petit hommage à la pyramide du cinéma

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Le Clap célèbre en novembre son 30e anniversaire. Le plus récent magazine le souligne bien avec sa couverture glacée et un article que j’ai eu à signer sur cet anniversaire qu’il ne faut pas passer sous silence. À Québec, Le Clap est devenu rapidement une institution, un incontournable. Sa disparition serait une catastrophe pour tous ceux qui apprécient la diversité cinématographique, pour ceux qui aiment voyager à travers le monde dans le confort d’une salle obscure dédiée au 7e art. Depuis trois décennies, c’est à cet endroit qu’on a suivi la carrière de Depardieu et Huppert, admiré les films de Wenders, d’Almodóvar, de von Trier, découvert Tarantino, Ang Lee et Poelvoorde, vu Incendies de Denis Villeneuve et J’ai tué ma mère de Dolan.

Le texte sur ce 30e, paru dans le magazine de novembre/décembre, donne la parole à celui qui a lancé Le Clap, Michel Aubé, et à Richard Gouge, projectionniste depuis son ouverture. J’avais envie aujourd’hui, via le blogue, d’ajouter quelques mots à ceux que ces deux passionnés de cinéma  m’ont confiés. Une réflexion personnelle me poussant à ste-foy_innovation_2012_06_01affirmer que le Cinéma Le Clap, avec ses sept salles, joue également un rôle éducatif essentiel dans la région. Par sa programmation, riche et internationale, il offre aux différentes générations les points de vue de cinéastes provenant de tous les continents. Il nous permet de mieux connaître les sociétés actuelles d’Europe, d’Asie, d’Afrique ou d’Amérique latine. Et à l’heure où des voix se font entendre sur certaines tribunes médiatiques, réclamant des actions qui relèvent d’une sorte de repli identitaire face à ce qui se passe ailleurs sur la planète, Le Clap, lui, par sa mission, fait preuve d’une formidable ouverture sur le monde, et ce, je le rappelle, depuis 30 ans.

C’est dans ces petites salles, au fil des années, que j’ai vu des films allemands, sud-coréens, mexicains, égyptiens, iraniens et grecs. Situé depuis son ouverture dans le sous-sol d’une drôle de pyramide, Le Clap a indéniablement une importance culturelle « pharaonique » dans notre façon de voir le monde. À nous, amoureux du cinéma, de continuer à nous y rendre pour au moins 30 autres années, afin de conserver ce regard curieux sur l’univers qui nous entoure.

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Floride, état tragicomique.

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Le cinéaste Philippe Le Guay s’est fait connaître avec plusieurs films qui mettaient en vedette Fabrice Luchini, dont Les Femmes du 6e étage et Molière à bicyclette. Âgé de 59 ans, le réalisateur français était de passage au Québec cette semaine pour faire la promotion de son huitième long métrage intitulé Floride et qui prendra l’affiche à la fin du mois.

Tiré de la pièce de théâtre Le Père écrite par le romancier Florian Zeller, Floride raconte les aventures de Claude, un octogénaire qui n’a qu’une obsession, soit celle d’aller rejoindre sa fille cadette, exilée depuis des années en Floride. Carole, l’aînée, doit alors intervenir par crainte que le pire ne survienne pour son père, lui pour qui les pertes de mémoire sont de plus en plus graves et prononcées. Le grand Jean Rochefort incarne Claude aux côtés de Sandrine Kiberlain qui prend ici les traits de sa fille Carole.

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Philippe Le Guay et Jean Rochefort

En entrevue, Philippe Le Guay confirme avoir beaucoup aimé la pièce de Zeller : « Ce que j’aimais, c’est la situation d’un homme qui perd la mémoire et qui n’arrive pas à dire à sa fille qu’il l’aime. J’ai deux sœurs et j’ai été témoin de l’absence et de l’attente de reconnaissance paternelle, le malentendu que cela provoque des deux côtés, ça m’a toujours ému. Le personnage de Claude, c’est un homme dans le déni qui se réfugie dans cette panne de mémoire, car c’est une situation qui l’arrange. Ainsi, on prend plaisir aussi à le détester, car il est enfantin, impérieux, excessif dans ses humeurs. Il est aussi fragile que terrifiant de mauvaise foi. Jean est formidable dans ce rôle, Sandrine et lui se connaissaient très bien et avaient envie de travailler ensemble, alors le film s’est construit là-dessus ». Pour Philippe Le Guay, le plus difficile dans ce projet a été d’arriver à un équilibre dans le ton, ne pas tomber dans le pathos ou le mélodrame, avoir une tonalité juste et précise alternant les moments drôles et ceux plus touchants.

Si le réalisateur est d’accord pour dire que le filon de la vieillesse est davantage exploré depuis quelques années au cinéma (Away from her, Et si on vivait tous ensemble?), l’aspect portant sur la proximité d’une fille avec son père, lui, se voit beaucoup plus rarement et il en est fier. « Au-delà de cette relation père-fille, ce que j’aime le plus de mon film, c’est le mélange des genres, l’humour qui côtoie le drame à tout moment, ça me correspond énormément. J’aime mélanger les tons, c’est ce qui me guide au cinéma, davantage que les histoires en fait », de conclure Philippe Le Guay qui bosse actuellement sur un scénario original qui devrait prendre vie au grand écran au courant de l’année 2016.

Bande annonce de Floride :

Les 10 films à voir en novembre

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Love, réalisé par Gaspar Noé

Oui, en novembre, il y aura le nouvel épisode des aventures de James Bond, l’intrigant biopic Trumbo avec Bryan Cranston, la version animée de La Guerre des tuques et la conclusion de Hunger Games, mais au-delà de ces quatre fort attendus longs métrages, voici les dix autres films qui, selon moi, méritent notre attention lors du mois des morts de 2015. Il faut aussi noter que deux de ces films, Room et The Secret in their Eyes, ont vu leurs dates de sorties initiales reportées en novembre.

1-Love : Les films de Gaspar Noé ne laissent personne indifférent. Après nous avoir offert Seul contre tous, Irréversible et Enter the Void, le cinéaste français d’origine argentine, avec Love, nous plonge cette fois-ci au coeur d’une relation amoureuse sulfureuse condamnée à mal se terminer. Avec en bonus un érotisme cru filmé en 3D. Date de sortie prévue : 27 novembre.

2-The 33 : Coproduit par le Chili, ce film américain relate les 69 jours passés par 33 mineurs chiliens, emprisonnés sous terre, à 700 mètres de profondeur lors de l’été 2010. Cette histoire surréel nous montre la ténacité de ces travailleurs et le branle-bas the-33-int-poster1-600x888de combat mis en place pour les secourir. Antonio Banderas et Juliette Binoche sont au coeur de cette distribution internationale. Date de sortie prévue : 13 novembre

3-Carol : Portrait d’un amour saphique passionné et interdit campé dans la prude Amérique des années 50, Carol offre des rôles en or à Rooney Mara et Cate Blanchett. D’ailleurs, cette dernière ne cesse d’accumuler les rôles de composition où elle excelle bien évidemment. Et avec Todd Haynes (I’m not There, Mildred Pierce) aux commandes, on peut déjà prévoir pour ce fil, son lot de nominations aux Oscars. Date de sortie prévue : 20 novembre.

4-Legend : Legend, c’est l’histoire des frères jumeaux Kray, deux gangsters ayant sévi dans l’Angleterre des années 50 et 60, incarnés dans le film par un seul et unique legend-postercomédien, à savoir l’imperturbable caméléon Tom Hardy.  Aux commandes de ce polar biographique noir et sanglant, le réalisateur-scénariste Brian Helgeland, oscarisé pour l’adaptation cinématographique de L.A. Confidentiel de James Ellroy. Date de sortie prévue : 27 novembre.

5-Les Êtres chers : Alors qu’elle vient tout juste de terminer le tournage de son troisième long métrage inspiré de la vie de l’auteure Nelly Arcan, Anne Émond (Nuit #1) nous offre Les Êtres chers, un drame psychologique troublant, autour d’une famille blessée par le suicide du patriarche. Maxim Gaudette et Karelle Tremblay y trouvent de fort beaux rôles au coeur d’une histoire qui s’étale sur plus de vingt ans. Date de sortie prévue: 20 novembre.

6-By the Sea : Avec ce long métrage, on a droit à une curiosité. Peu de choses transpirent jusqu’ici de ce drame conjugal mettant en vedette, à la ville comme à l’écran, le couple formé de Brad Pitt et d’Angelina Joli. Réalisé par cette dernière, le film se déroule dans un petit village côtier de France, durant les années 70, alors qu’un écrivain américain et son épouse remettent en question leur vie de couple. La distribution est By_The_Sea_Teasermajoritairement française, Mélanie Laurent et Melvil Poupard étant entre autres de l’aventure. Date de sortie prévue : 13 novembre.

7-Spotlight : Salué partout où il a été projeté, Spotlight montre les dessous de l’enquête menée par des journalistes du Boston Globe concernant des pasteurs qui seront, grâce au travail des scribes, accusés d’agressions sexuelles sur de jeunes enfants. La distribution, oscarisable selon la rumeur, est formée de Michael Keaton, Mark Ruffalo et Rachel McAdams. Date de sortie prévue : 20 novembre.

8-Valley of Love : Depardieu suffoquant sous un soleil de plomb. Depardieu bedonnant, lourd et à bout de souffle. Depardieu qui fume et qui boit. Depardieu retrouvant Isabelle Huppert 35 ans après le Loulou de Pialat, Depardieu vivant à nouveau le décès d’un fils. Valley of Love, c’est tout ça. À fuir, 863425ou à voir absolument pour tout ce que représente Gégé à titre de monstre cinématographique. Sortie prévue : 6 novembre.

9- Secret in their Eyes : Remake hollywoodien du remarquable film argentin Dans ses yeux, ce long métrage est passé sous le radar aux États-Unis malgré la réception de l’Oscar du meilleur film en langue étrangère en 2010. Le scénario original de ce suspense, qui tourne autour de la justice et de la vengeance, est  fort habile et la nouvelle distribution, elle, des plus éclatantes avec entre autres Nicole Kidman, Chiwetel Ejiofor (Twelve Years a Slave), et Julia Roberts. Date de sortie prévue : 20 novembre.

10- Room : Basé sur le best-seller de l’écrivaine Emma Donoghue, qui elle-même s’était inspirée d’un fait divers autrichien, cette coproduction irlando-canadienne se penche sur la vie d’un jeune garçon de cinq ans gardé en captivité dans un cabanon de jardin aux côtés de sa mère. Cette dernière y vit séquestrée depuis son adolescence. Cette réalisation troublante, mettant en vedette Brie Larson, pourrait causer la surprise cette saison et être LE FILM que personne n’attendait. Date de sortie prévue : 6 novembre.