Viande froide au grand écran

Réalisé par le comédien, humoriste et réalisateur Fabrice Ébroué, Barbaque raconte les aventures de Vincent et Sophie qui tiennent une petite boucherie au Havre et qui forment un couple au bord de la rupture. Mais lorsqu’un incident dramatique les amène à mettre sur les tablettes une drôle de viande froide qu’ils appellent le jambon d’Iran, les ventes décollent, les clients font la file et leur amour retrouve sa vigueur d’antan. Mais le succès de ce jambon les entraîne dans une spirale sanglante inattendue.

Marina Foïs (L’Atelier, Polisse) est en vedette aux côtés du cinéaste dans cette comédie absurde, loufoque, romantique et gore à la fois. Rencontrée récemment pour la promotion du film qui arrive sur nos écrans en mars, l’actrice a donné des détails sur Barbaque ainsi que sur ses nombreux prochains projets au cinéma.

Le Clap : Marina, comment êtes-vous arrivée sur ce projet de comédie très singulière?

Marina Foïs : Fabrice m’a envoyé le scénario par la poste et le récit m’a beaucoup fait rire. Malgré mes débuts en humour avec la troupe les Robins des bois, j’ai fait très peu de comédie dans ma carrière, alors quand un scénario provoque une telle réaction chez moi, ça m’incite à dire oui. On pense parfois à moi pour des comédies, mais je suis difficile. Je cherche l’originalité du projet ou encore une histoire absurde qui me plaira et c’était totalement le cas avec Barbaque. En plus, ce qui était séduisant avec ce film, c’est que ça frisait la comédie romantique à travers un couple qui va se reconstruire en vivant une véritable histoire meurtrière. Bref, c’est un mélange de gore et de romantisme, et ça, c’est rare!

Le Clap : Le film se moque de beaucoup de choses liées au militantisme d’aujourd’hui dont une frange, plus radicale, s’en prend aux petites boucheries, petits restaurants et consommateurs de viande dans une ère où le véganisme est devenu un mode de vie pour bien des gens. Est-ce délicat de faire de l’humour avec un sujet comme celui-là?

MF : Je ne crois pas que ce soit si délicat, car Barbaque n’est pas un film à charge, ni contre les végétariens, ni à l’inverse vis-à-vis ceux qui sont carnivores. Il faut défendre les animaux et la planète, ça oui! Après, sur la manière dont on le fait, il y a matière à discussion surtout s’il y a de la violence. Le problème, c’est le manque de nuance et Barbaque, comme film, mise sur l’humour ironique. C’est salutaire l’humour. De plus, dans tout ça, il faut faire une différence entre les boucheries industrielles et les gens qui maltraitent les animaux d’un côté et les plus petits producteurs et éleveurs de l’autre.

Le Clap : Une comédie, c’est une mécanique en soi. Quand on ajoute des effets gores pour faire de l’humour, est-ce que ça change la dynamique sur le plateau car il faut le dire, le film, bien qu’hilarant, est sanglant?

MF : La comédie, c’est du rythme, de la précision, de la rigueur. Sur le plateau de Barbaque, il y avait des scènes très drôles à faire à cause de l’aspect gore effectivement, et ça nous amenait à rigoler, disons différemment, comme on peut le faire à un enterrement. De mon côté, j’ai surtout pris plaisir à interpréter Sophie, une manipulatrice, maline et cruelle. C’est ce qui la rend si intéressante, c’est elle qui insuffle de la vie dans ce couple rempli d’amertume.

Le Clap : Les histoires de boucherie dans le cinéma français, je pense au film Le Boucher de Claude Chabrol ou encore à Carne et Seul contre tous de Gaspar Noé, sont toujours un peu, voire très malsaines, non?

MF : Ha! Ha! Ce n’est pas faux. Les boucheries, c’est un décor particulier et il faut croire que c’est très inspirant pour des cinéastes.

Le Clap : En regardant votre feuille de route, je vois que les tournages s’enfilent à la vitesse de l’éclair. Votre rythme de travail est effarant.

MF : C’est vrai, j’ai beaucoup tourné, souvent trois ou quatre films par an. L’année qui vient ne fera pas exception parce qu’on me verra avec Denis Ménochet dans un suspense rural, As bestas, du talentueux réalisateur espagnol Rodrigo Sorogoyen. Puis, il y aussi eu le tournage de L’Année du requin avec Anthony Bajon, réalisé par les frères Boukherma. C’est une histoire incroyable, une sorte de remake de Jaws, à la fois film de genre et drame social inspiré par le cinéma asiatique et qui profite d’une réelle liberté formelle dans sa conception. Enfin, il y a Cet été-là d’Éric Lartigau où je joue aux côtés de Gael García Bernal et Chiara Mastroianni. Mais bon, là, j’avoue qu’il faut que je pense à ralentir tout ça un peu.

Cette entrevue a été réalisée sur invitation, dans le cadre des Rendez-vous du cinéma d’UniFrance 2022.