100 kilos d’estime de soi

100 kilos d’étoiles

Il y a de ces films dont l’intention première est de faire du bien. 100 kilos d’étoiles, premier long métrage de Marie-Sophie Chambon, est de ceux-là. Avec humour et légèreté et aussi beaucoup de finesse, le film aborde l’amitié à l’adolescence et surtout l’acceptation de soi malgré la lourdeur du regard des autres qui peut facilement plomber l’estime de soi. Inévitablement, l’œuvre rappelle Jeune Juliette d’Anne Émond, sorti l’été dernier dans nos salles, film qui explorait un peu les mêmes thématiques.

100 kilos d’étoiles raconte l’histoire de Loïs, jouée par la nouvelle venue Laure Duchêne, une ado surdouée en sciences qui rêve de devenir cosmonaute. Mais sa détermination à réaliser son rêve est gravement minée par un surplus de poids qui l’accable et que son entourage se plaît à lui rappeler. Heureusement pour elle, sa rencontre avec trois autres adolescentes, devant composer également avec des troubles divers, aura pour effet de lui redonner confiance et ensemble, les nouvelles amies partiront sur la route afin de participer à un camp spatial unique en son genre.

La réalisatrice Marie-Sophie Chambon explique la genèse de son road movie familial qui prendra l’affiche au cinéma Le Clap dès le début du mois de juillet.

Marie-Sophie Chambon, réalisatrice.

Le Clap : Marie-Sophie, parlez-moi de l’idée de départ de votre film, du message que vous vouliez transmettre avec ce récit d’une adolescente ambitieuse, mais mal dans sa peau.

Marie-Sophie Chambon : L’idée, c’était de parler de jeunes filles qu’on voit peu au cinéma. Jeune, ma sœur a eu un problème de surpoids et pour elle, et toutes celles qui en souffrent, cette situation prend rapidement la forme d’une véritable prison. D’ailleurs, en voyant mon film, ma sœur a réagi en disant : « Enfin, les choses sont dites ». Ça prouve qu’il y a tant à dire sur ce sujet encore un peu tabou. J’avais donc envie, au départ, de raconter l’histoire de jeunes filles un peu décalées et qui peuvent trouver un sens à leur vie. Peu avant de réaliser le film, alors que je peaufinais le scénario, j’ai réalisé Princesse, un court métrage qui est un peu un prequel (antépisode) de 100 kilos d’étoiles. De faire mon court et d’avoir un bel accueil pour ce dernier, ça a définitivement aidé à financer le long.

Le Clap : Trouver la jeune actrice idéale, ça a été facile?

MSC : Oh que non. Et je savais qu’en trouvant l’ado parfaite, mais inexpérimentée pour le rôle, ça n’allait en rien aider à financer mon film, car les investisseurs aiment les stars. Mais bref, ça a pris un an et demi pour trouver Laure et les trois autres actrices. Ces jeunes filles allaient devoir montrer leurs corps au grand écran et ça, ce n’était vraiment pas évident. On a fait du casting sauvage, on a visité des lycées, on a espionné des profils Facebook et finalement, c’est au Salon du livre de Paris qu’on a trouvé Laure. Quand on lui a offert de passer en audition, elle a cru à une blague. Heureusement, elle a embarqué dans l’aventure et lors de l’audition, on a bien vu qu’elle correspondait parfaitement au personnage de Loïs.

Le Clap : Dans votre film, les adolescentes se rendent à un camp d’astronomie étonnant. Ça existe vraiment en France ce genre de rassemblement?

MSC : Absolument. J’y suis allée deux fois et ça se déroule dans des bases militaires. Ils font des lancements de fusées et les jeunes viennent de partout, de Russie, du Japon et d’ailleurs. Il y a cependant très peu de filles dans ce camp, mais c’est marrant de les voir aller. Ils cousent des parachutes, ils font de la soudure. Ils touchent à tout et sont passionnés par cette compétition.

Le Clap : Votre film n’est pas qu’un récit dramatique, vous y avez ajouté plusieurs pointes humoristiques.

MSC : Oui, car si je voulais parler du rapport à notre corps à l’adolescence et parler des rêves adolescents, comme celui de devenir astronaute, il fallait balancer l’histoire et y intégrer un peu d’humour afin d’éviter que le fil narratif ne devienne trop dramatique. Je suis heureuse du résultat. D’ailleurs, au Festival de Cannes l’an passé, notre film a été projeté dans un cadre jeunesse, dans des salles remplies d’ados. La réaction a été hyper-positive. Ils ont rigolé, ils ont été touchés. Une jeune fille nous a remerciés en disant qu’elle se trouvait moche et que notre histoire lui avait fait un bien énorme. J’ai été très émue de sa réaction. Pour moi, ça justifie pourquoi on fait des films. Mon long métrage a un peu changé son regard sur elle-même.

Le Clap : Votre sujet est assez universel, c’est ce qui explique son succès auprès de nombreux distributeurs dans le monde?

MSC : Oui, je le crois, car il a été acheté notamment en Australie, en Corée du Sud, au Brésil et évidemment au Québec. Tout ça, pour moi, c’est magique.

100 kilos d’étoiles est à l’affiche au Clap. Cette entrevue a été réalisée sur invitation, dans le cadre de la 22e édition des Rendez-vous du cinéma d’UniFrance 2020, à Paris.