Les films rêvés

Jean Rochefort dans L’Homme qui tua Don Quichotte.

Près de 400 films prennent l’affiche en salle au Québec annuellement, principalement des longs métrages américains, français et québécois (dans ce dernier cas, 60 titres, fictions et documentaires compris). Certains sont uniquement distribués en VSD/DVD et d’autres ne sortent jamais sur notre territoire. Mais au-delà de ces sorties, il y a aussi des films dont les tournages avortent. Ceux qui, simplement par leurs synopsis, leurs distributions, leurs réalisateurs, font rêver avant même un premier tour de manivelle, tour qui hélas ne viendra jamais. Voici quelques titres qui n’ont jamais vu le jour et qui sont un peu devenus des œuvres cultes fantomatiques.

Romy Schneider dans L’Enfer

L’Enfer d’Henri-Georges Clouzot : Un très beau documentaire avait pris l’affiche au Clap en 2009 et relatait toute l’ambition de ce long métrage inachevé  de 1964. La fin du tournage fut abrupte, Clouzot ayant fait un infarctus. Des images d’archives psychédéliques de Romy Schneider circulent encore pour nous faire fantasmer, elle qui était la tête d’affiche du drame aux côtés de Serge Reggiani.

L’Homme qui tua Don Quichotte de Terry Gilliam : En fait, Gilliam le fera enfin son film sur le célèbre personnage de Cervantes. La première tentative ayant pris la forme d’un échec retentissant à cause des torrents qui avaient détruit une grande partie des décors et de la double hernie discale de Jean Rochefort qui l’empêcha de monter à cheval. Jonathan Pryce accompagné d’Adam Driver se retrouvent au cœur de la nouvelle production qui devrait prendre l’affiche d’ici la fin de 2018.

Crusade : Après le succès de Total Recall, en 1990, Arnold Schwarzenegger voulut refaire équipe avec le réalisateur néerlandais Paul Verhoeven afin de mettre en scène une fiction autour des croisades du XIe siècle. Il faut dire que le cinéaste avait déjà fait ses preuves dans l’univers médiéval avec La Chair et le sang quelques années plus tôt tout comme l’acteur avec Conan le barbare. Hélas, le budget estimé à plus de 120 millions de dollars fera peur aux producteurs qui abandonneront le navire…

Dune d’Alejandro Jodorowsky : Encore là, un documentaire épatant a été fait sur ce projet démentiel qui a fait peur aux producteurs de l’époque, projet qui regroupait une équipe d’artistes tout étoile devant et derrière la caméra dont Orson Welles, Pink Floyd, Dali, H. R. Giger, Moebius et Mick Jagger. Après le flop de l’adaptation qui fut par la suite réalisée par David Lynch, c’est Denis Villeneuve qui, à son tour, s’attaque à la prochaine version grand écran de ce classique de la science-fiction signé Frank Herbert.

La Montagne hallucinée : Roman phare de H.P. Lovecraft, l’adaptation devait être signée par Guillermo del Toro. Les aptitudes du cinéaste mexicain à mettre en scène des créatures étranges comme dans Le Labyrinthe de Pan et The Shape of Water auraient été parfaites dans ce contexte. Certaines rumeurs persistantes évoquent que le projet ne serait pas totalement mort à l’heure actuelle.

Tim Burton et Nicolas Cage

Superman Lives de Tim Burton : L’ex-blogueur de La Presse Josef Siroka avait résumé, dans un fort  bon texte,  toute la mésaventure entourant cette production mise en chantier au milieu des années 90 avec Kevin Smith au scénario (du moins au départ) et Nicolas Cage dans la peau du super-héros. Le studio Warner Bros a saboté le tout, craignant de lourdes pertes financières, l’âge d’or des films de super-héros n’étant pas démarré.

La Trilogie des dragons : Essuyant refus sur refus de la part des institutions publiques pour financer ce film tiré de sa propre pièce de théâtre, Robert Lepage a fini par abandonner, en 2006, l’idée de l’adapter pour le cinéma et par le fait même toute ambition cinématographique. Quel dommage!

Napoléon : Stanley Kubrick rêvait d’en faire une grande fresque, et ce, tout de suite après la sortie de 2001… MGM était derrière lui, 500 000 figurants avaient été recrutés pour les scènes de bataille et des tonnes d’archives avaient été accumulées afin de reconstituer au mieux cette époque guerrière au grand écran. Les éditions Taschen ont publié un ouvrage remarquable sur le tout, un livre ayant pour titre Stanley Kubrick’s Napoleon : the Greatest Movie Never Made.

Black Hole : Voilà l’une des bandes dessinées les plus cultes dans le monde du 9e art américain. Et one parle pas ici de comics ni de super-héros, mais d’un univers tordu, un roman graphique plus déstabilisant que ceux réalisés par Daniel Clowes ou Robert Crump. Black Hole se situe dans le Seattle des années 70 et suit un groupe d’adolescents victimes d’une mystérieuse maladie provoquant des mutations physiques. C’est David Fincher qui était chargé de réaliser la version ciné, mais qui ne semble plus dans le portrait. Brad Pitt détiendrait encore les droits d’adaptation de la BD comme producteur. Bref, il y a toujours une lueur d’espoir dans ce dossier.

– Finalement, le champion des avortements cinématographiques est assurément Orson Welles. Pas moins de sept longs métrages mis en branle par Welles ont été relégués aux oubliettes du 7e art, dont The Other Side of the Wind avec John Huston. Le cinéaste Peter Bogdanovich qui y jouait l’un des principaux personnages a toujours comme souhait de terminer le montage du film.

En terminant, pour les curieux, un livre a été lancé concernant le sujet et donne moult détails sur des dizaines de films n’ayant pas vu le jour. Son titre : Les plus grands films que vous ne verrez jamais. Il est signé par Simon Braund et est publié aux Éditions Dunot.